L’État du Vatican et la suprématie de Dieu

par Francine Dupras et Jean-Marc Rufiange

Dans la Couronne invisible, nous nous sommes penchés sur le concept de souveraineté en regard de la Constitution canadienne. Dans l’essai en question, nous avons fait une observation concernant l’État du Vatican qu’il nous faut maintenant remettre en perspective :

À notre connaissance, le Canada est le seul pays au monde qui fonde sa Constitution sur des principes reconnaissant la suprématie de Dieu en corrélation avec la primauté du droit. Aucune autre monarchie constitutionnelle ne le stipule, ni le Royaume d’Arabie Saoudite, ni même l’État du Vatican.

La Cité du Vatican est un pontificat : «Le Souverain Pontife, Souverain de l’État de la Cité du Vatican, possède les pleins pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire» (Loi fondamentale, 26 novembre 2000, Article 1). Bien que sa Constitution n’ait pas de Préambule reconnaissant explicitement la suprématie de Dieu (du moins pas encore), François vient de poser en tant que successeur de Pierre un geste qui va directement dans le sens d’affirmer la souveraineté de Dieu sur son État.

La consécration de l’État de la Cité du Vatican à Joseph, gardien de la Sainte Famille, et à l’archange Michel, le 5 juillet 2013, est un geste hautement politique. Le fait que cette double consécration ait eu lieu lors de la bénédiction d’une statue de saint Michel, installée sur la place du Gouvernorat, ne doit pas nous conduire à penser qu’il ne s’agit que d’un geste à caractère religieux.

Pourquoi instituer Michel comme patron de la Cité du Vatican? « Michel  – qui signifie : <Qui est comme Dieu ?> –  est le champion de la primauté de Dieu, de sa transcendance et sa puissance », a expliqué François, et il a conclu sur ces mots : «En consacrant l’État de la Cité du Vatican à saint Michel Archange, nous lui demandons qu’il nous défende du Malin et qu’il le jette dehors.» Dans la perspective d’un État qui reconnaît la primauté de Dieu, cet acte consiste ni plus ni moins à expulser du pays, à chasser de son territoire, un indésirable – l’indésirable suprême.

Pour lire la partie de l’allocution de François concernant la consécration à Michel : http://www.zenit.org/fr/articles/la-victoire-est-a-dieu (l’article de Zenit n’est plus disponible)

François a aussi consacré l’État du Vatican à Joseph, gardien du Rédempteur, gardien de la Sainte Famille. Pour lire le texte de cette consécration en entier :
http://www.zenit.org/fr/articles/priere-de-consecration-du-vatican-a-saint-joseph (l’article de Zenit n’est plus disponible)

Après le récent Décret de l’Église qui demande que le nom de Joseph soit désormais mentionné dans toutes les prières eucharistiques, cette consécration de l’État de la Cité du Vatican à Joseph et à l’archange Michel manifeste une sorte de repositionement des fonctions politiques dans lequel Joseph et Michel sont réévoqués avec force comme gardien et défenseur de l’Église. Le prince héritier de la lignée de David et le Prince des anges retrouvent la place qui leur est due. En fait, François proclame ainsi qu’il n’est pas le « prince » de l’Église mais qu’il exerce le ministère de successeur de Pierre comme un véritable gardien (custos), tel qu’il en a esquissé la figure dans son homélie inaugurale, lors de la solennité de Joseph, le 19 mars 2013.

Dans ce contexte, nous trouvons opportun de republier (ci-dessous) un article qui a paru sur le site Tendances et Enjeu, le 5 octobre 2010, ainsi que ses deux commentaires. Les enjeux qui y sont évoqués (cette « partie de bras de fer »), François semble vraiment déterminé à les affronter, et son pontificat, si jeune, est déjà marqué d’une profonde réorientation, un nouvel aggiornamento qui aura sans doute un impact profond sur l’Église à venir.

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•Joseph et l’Archange
Publié le Mardi 5 octobre 2010 par Francine D. Pelletier

Dans la suite de mon blogue d’hier « Joseph et une Église ouverte », je voudrais évoquer d’autres circonstances liées au Concile Vatican II qui méritent, selon moi, que l’on s’y attarde. Elles permettent d’établir une conjonction entre Joseph et l’archange Michel en ce qui concerne la défense de l’Église.

Jean XXIII avait mis le Concile qu’il avait convoqué sous la protection de Joseph, en 1962. Il est décédé l’année suivante. Le pape suivant, Paul VI, ouvre la seconde session du Concile, le 29 septembre 1963, jour de la fête de l’archange Michel. Paul VI commence son discours d’ouverture en mettant cette partie du Concile sous la protection de l’Archange en tant que « défenseur du peuple chrétien ». Pourquoi Michel ?

Il est de notoriété publique que le 13 octobre 1884, à la fin de la messe, le pape Léon XIII aurait eu une vision terrifiante concernant l’Église. Profondément troublé, il s’est empressé de composer une prière spéciale à l’archange Michel et il a ordonné que cette prière soit récitée à la fin de chaque célébration eucharistique. Cette directive est restée en vigueur durant 110 ans, jusqu’à ce que l’Instruction Inter oecumenici (n° 48, § j) décrète que les prières de Léon XIII étaient supprimées, le 26 septembre 1964. En 1994, Jean-Paul II insistera pour que les catholiques la récitent à nouveau.

Résumons. Jean XXIII introduit Joseph dans le canon de la messe en 1962, on l’en retire en 1969. En 1884, Léon XIII ordonne que l’on prie Michel après chaque messe, et, en 1963, Paul VI met la seconde session du Concile Vatican II sous sa protection; par contre, l’année suivante, en plein Concile, on retire la prière de Léon XIII récitée après la messe, mais Jean-Paul II la remet à l’ordre du jour, trente ans plus tard.

Quel est l’enjeu de cette partie de bras de fer ?

•2 réponses à Joseph et l’Archange

Gaby dit : 
Vendredi, 8 octobre 2010 à 16:48
L’enjeu? J’avoue qu’il me dépasse et nous dépasse peut-être tous. C’est probablement pour cela que les personnes qui voient plus clair (ici des Papes) font appel à des ressources d’un autre ordre (les saints, les Anges). Je me répète ces paroles de Jésus: « Mon royaume n’est pas de ce monde ». Notre travail de chrétiens, chrétiennes est sans doute lui aussi d’un autre monde, un monde où il est question d’éternité, de salut.

Francine D. Pelletier dit : 
Samedi, 9 octobre 2010 à 11:19
 @Gaby
Je suis portée à penser que l’enjeu est une sorte de conjonction: le salut du monde et le règne de Dieu. Les deux sont intimement liés. La terre a besoin du ciel et le royaume des cieux est déjà parmi nous. Il est en travail et les voies empruntées me dépassent en effet. Par ailleurs, ce que j’ai découvert sur certains papes à l’occasion de mes derniers blogues m’a fait réfléchir sur le charisme attaché à leur responsabilité et je rejoins votre remarque à l’effet qu’ils « voient plus clair ». 
Pie IX, Léon XIII, Jean XXIII et Jean-Paul Il, sont des papes très différents. Quelqu’un pourrait même penser que leurs approches de la doctrine de l’Église s’opposent sur certains points. Par exemple, sur l’aspect politique, l’un est dit conservateur, l’autre libéral, un autre socialiste chrétien. Pourtant, ils ont tous manifesté une affinité singulière avec Joseph comme protecteur de l’Église, certains au point de lui remettre symboliquement l’anneau papal, appelé aussi «anneau du pêcheur», c’est-à-dire l’anneau de Pierre, chef des apôtres. Les papes ne sont-ils pas investis de la responsabilité de «garder les brebis»? Donc, ne sont-ils pas fondamentalement des «gardiens» ayant en ce monde le bon réflexe au bon moment, c’est-à-dire dans les moments critiques? Ils voient alors plus clair…

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1 Responses to L’État du Vatican et la suprématie de Dieu

  1. Lucie dit :

    Sûrement que le pape Francois voit clair pour consacrer l’État de la Cité du Vatican à Joseph (Terreur des démons), et à l’archange Michel. « Car nous ne luttons pas contre des hommes, mais contre les forces invisibles, les puissances des ténèbres qui dominent le monde, les esprits du mal qui sont au-dessus de nous.  » (Eph 6,12)

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