Quarantaine

Par Francine Dupras et Jean-Marc Rufiange

Ouverture

Mariam ouvre les yeux comme si elle venait tout juste de les fermer, aussitôt attentive. Aucun bruit, que le plein silence. Dans la soukka, la clarté du jour s’invite discrètement. Une bénédiction jaillit aussitôt de son coeur:

– « Béni sois-tu, Élôïm ».

Puis elle entend l’Enfant remuer dans la mangeoire, que Iôçeph, en un tour de main, avait su transformer en une crèche très confortable. Aucun mot ne saurait exprimer cette part d’elle-même qui s’était éveillée en même temps que le Nouveau-Né. Cette intime sollicitude entre deux êtres humains, cette relation unique entre une mère et son enfant.

Iaoué lui-même avait choisi de décrire l’amour qu’il éprouvait pour son peuple, non seulement comme celui d’un Époux pour son Épouse, mais comme celui d’une mère pour son enfant.

Mariam pense à Haoua.

Après que Iaoué-Élôïm eut annoncé les conséquences de la chute, qu’en vertu de la faute même, l’Humain prend pour des condamnations, Adam, l’Humain, nomma la femme Haoua: La vie! Haoua, la «ima» (mère) de tous les vivants. Fécondité de la femme!

Cela ne peut pas être la conséquence d’une condamnation. Le premier geste de l’Adam tombé est une bénédiction. Et déjà la grâce de Iaoué-Élôïm se révèle. Amorce de rédemption.

Et Mariam se souvient de la bénédiction de Iaqov pour son fils Iôçeph.

Par le Dieu de ton père, qui te secourt, par El Shadaï qui bénit: Bénédictions des cieux d’en haut, bénédictions de l’abîme couché en bas, bénédictions des mamelles et du sein, bénédictions des épis et des fleurs, bénédictions des montagnes antiques, attirance des collines éternelles, qu’elles viennent sur la tête de Joseph, sur le front du consacré d’entre ses frères! [1]

Double part de bénédictions.

Mariam se lève. En elle, la hâte était exempte de toute précipitation, mue par l’amour. À cette heure, comme toujours, elle ne présume de rien. En ce qui la concerne, elle ne spécule jamais. Elle écoute. Elle veille. Elle cherche constamment la volonté du Tout-Puissant et se dispose à l’accomplir, quelle qu’elle sera.

Premier jour

– « Shalom Mariam. »

C’était la voix de Iôçeph. Il se tenait là, sur le seuil de la soukka, les embrassant tous deux de son regard.

– « Shalom Iôçeph », lui répondit Mariam d’un même coeur. [2]

Au comble de la paix, l’époux laissa l’épouse vaquer aux soins de l’Enfant et se rassit sur le siège improvisé qu’il avait placé juste à côté de la porte, à l’extérieur de la soukka.

Il s’était éveillé avant l’aube. Écoutant dans l’obscurité, il avait su distinguer le souffle ténu et régulier du Nouveau-Né de celui plus rauque des bêtes attachées au dehors, tout contre la soukka. Dans ce silence animé, il avait soudain compris à quel point il était heureux. Si pleinement heureux.

Sous l’effet de ce bonheur, il était sorti dans la fraîcheur de la nuit finissante pour contempler les cieux, la multitude des étoiles, image de la postérité d’Avraâm: « Je rendrai ta descendance aussi nombreuse que les étoiles », avait dit Élôïm.

En cette heure favorable, tout ce qui avait souffle de vie, tout ce qui existait autour de lui, sembla affluer à son coeur pour alimenter sa faim, sa soif d’adoration. Debout, ne remuant que les lèvres, il s’immergea dans la Parole du Shema Israël pour la faire sienne:

– « Iaoué, tu es l’unique. Je t’aime de tout mon coeur, de toute mon âme, de toutes mes forces… »

Unique aussi était le Fils qui dormait dans la soukka. Iôçeph l’aimait de cet amour intense qui attire au-dedans et en même temps pousse au-dehors. Tel était l’effet que produisait l’Enfant. Les anges eux-mêmes avaient quitté leur invisibilité pour annoncer aux bergers la nouvelle d’un Fils-Sauveur. Et les bergers avaient quitté leurs troupeaux pour venir voir le Nouveau-Né. Il y avait de cela, quoi, à peine quelques heures?

Car le temps en cette première nuit, la nuit de la naissance, s’était comme arrêté. Non, il s’était approfondi. Comme si le puits d’une eau vive avait été creusé dans la chair de la terre. Iôçeph ne désirait plus qu’une chose, que l’on puise et que l’on s’abreuve à cette source qu’Élôïm avait fait surgir dans la maison de Daouid, son serviteur.

L’âne, leur compagnon de route, et le boeuf, seul hôte de cette soukka si providentiellement abandonnée, lui apparaissaient comme les témoins muets de cette vivification du monde. Iôçeph leur avait caressé un moment l’échine en songeant à la parole mystérieuse d’Ishaia: « Heureux serez-vous de semer partout où il y a de l’eau, de laisser en liberté le boeuf et l’âne [3] ». Débordant d’espérance, il entrevoyait déjà les semences et les récoltes à venir, et il imaginait le boeuf et l’âne, comme toute chair, soumis et libres.

C’était pour mieux goûter ces instants que Iôçeph s’était installé tout près de la porte comme un gardien, laissant les impressions bienheureuses de cette nuit irriguer son coeur et sa mémoire. Et il avait attendu le jour tout proche.

Maintenant que Mariam s’était levée et que l’Enfant était éveillé, quel matin ravissant!

Encore tout à sa méditation, Iôçeph vit soudain venir vers lui un couple, des notables si l’on se fiait à leurs vêtements et à leur allure calme et réservée. Lorsque Iôçeph se leva pour les accueillir, ceux-ci furent un moment intimidés par sa prestance, mais il y avait quelque chose dans son attitude qui, étrangement, rassurait aussitôt et les mit en confiance.

Ils le saluèrent: « Shalom alekhem! » et, comme c’est la coutume, Iôçeph leur répondit: « Alekhem shalom! ».

Les nouveaux-venus se présentèrent. Il s’agissait d’un homme du nom de Iônatan et de Léa son épouse [4]. Ils expliquèrent que des bergers, au retour de leur veille, avaient dit qu’un enfant était né durant la nuit dans une soukka. Quand la nouvelle leur était parvenue, ils s’étaient renseignés sur l’endroit exact et venaient offrir l’hospitalité de leur demeure.

Mariam les avait entendu parler de l’intérieur. Elle apparut dans l’embrasure de la porte avec l’Enfant. Rassasié de lait, celui-ci dormait béatement dans ses bras qui formaient comme une nouvelle crèche. Les visiteurs furent d’abord saisis d’admiration devant la beauté lumineuse de la jeune ima, qui semblait étonnamment fraîche et dispose après l’évènement de la nuit. Puis ce qui les attira fut l’extraordinaire mélange de vigueur et de douceur qui émanait du Nouveau-né. Un sentiment inconnu les poussa à s’approcher de lui, le plus près possible sans contrevenir à la loi de purification attachée à la naissance. Et ils restèrent un moment à s’imprégner de la tendresse incomparable qu’ils en ressentaient.

Mariam et Iôçeph acceptèrent avec reconnaissance l’hospitalité que leur offraient Léa et Iônatan. Sans attendre, Iôçeph alla chercher l’âne, aida Mariam à s’y installer avec l’Enfant. Puis il chargea leurs quelques effets et ils quittèrent la soukka. Après quelques pas, Mariam et Iôçeph se retournèrent pour la regarder une dernière fois. Ils ne pouvaient manquer de bénir la providence d’Élôïm qui avait choisi cet abri au temps prévu pour l’avènement du Fils promis. La soukka était l’humble portique où s’était manifestée sa Gloire. Immanou El ! [5]

Le boeuf, placide, restait seul à la soukka en attente de son propre maître, devant une belle botte de foin que Iôçeph lui avait préparée.

Dehors, le soleil avait complètement chassé l’humidité de la nuit et un vent léger laissait espérer une pluie bienfaisante.

Il y eut cette Nuit bénie, il y eut ce Matin. Ce fut le premier jour.

Jour d’accueil

Iônatan et Léa les avaient installés dans la seconde pièce de leur maison de Beit Lehèm où ils ne venaient plus que rarement. Ils habitaient en effet à Iéroushalaïm chez l’un de leur fils qui s’y était établi après son mariage.

Paisible, simple et agréable, la chambre était percée d’une étroite fenêtre et comportait pour le principal deux lits, un panier d’osier, une table, deux sièges, une lampe à l’huile et un chandelier. On y accédait en traversant une petite cour. Alors que Mariam restait pour s’occuper de l’Enfant et se reposer un peu, Iôçeph avait rejoint leurs hôtes qui souhaitaient faire plus ample connaissance.

La conversation se porta tout d’abord sur la sècheresse qui sévissait depuis plusieurs semaines et qui n’était pas inhabituelle en ces mois d’automne. Mais bientôt, les deux époux se prirent à parler d’une autre sècheresse, celle dont le peuple était affligé, accablé sous l’oppression de l’envahisseur romain, l’avidité et la cruauté d’un roi corrompu. Iôçeph écoutait attentivement et intervenait, toujours avec cette justesse qui avait fait sa réputation à Nazareth.

– « Même le zèle pour  la demeure de Élôïm semble s’être tari! », s’exclama Iônatan, comme en désespoir de cause et comme s’il adressait sa plainte à son invité.

Alors Léa osa parler de ce qui leur tenait à coeur depuis qu’ils avaient su la nouvelle:

– « Les bergers ont dit qu’ils avaient vu et entendu des Anges, cette nuit, et que c’est l’un d’entre eux qui leur a appris la naissance de votre fils… »

– « Des bergers sont en effet venus à la soukka et ils nous ont raconté tout ce qui leur est arrivé », leur confirma Iôçeph.

– « Ce qui nous a étonnés le plus, c’est que l’Ange a parlé de l’enfant comme d’un sauveur… l’Élu de Iaoué », poursuivit Léa, le coeur soudain palpitant.

– « Nous avons été dans l’étonnement nous aussi », fut le commentaire simple et vrai de Iôçeph.

Ce n’était pas un commentaire banalisant l’évènement. C’était l’expression d’une adhésion humble et discrète aux « voix » d’Élôïm qui s’était manifesté durant la nuit.

Il y eut comme le passage d’un souffle. Iôçeph fit mine de se retirer puis il se ravisa, et il leur confia la raison de leur venue à Beit Lehèm. Le recensement exigé par César.

Léa et Iônatan furent impressionnés d’apprendre qu’ils avaient invité chez eux, sans le savoir, des descendants de Daouid, en provenance de Nazareth dans le royaume du Nord.

Ils restèrent silencieux de longs moments.

Les témoignages de cette nuit, les bergers, les anges, cette conversation avec Iôçeph… Tout devenait clair. Dans leurs coeurs accueillants, l’espérance rayonnait. Ils surent que le Jour du Mashiah (Messie) était venu et, sans même avoir à se consulter, ils étaient désormais résolus à se mettre au service de l’Avènement. Sous l’effet de leur résolution, ils relevèrent la tête.

C’est ainsi que Iônatan et Léa se mirent derechef à la disposition de Iôçeph pour répondre, dans l’immédiat, aux besoins de la vie courante.

Lorsque tout fut entendu, Iôçeph manifesta le désir de rejoindre son Épouse et l’Enfant. En hôtesse attentionnée, Léa lui tendit avec empressement les chandelles qu’elle avait préparées pour eux en vue du prochain Shabbat et Iônatan lui apporta de son meilleur vin pour la coupe de bénédictions qui doit être offerte en ce jour sanctifié.

Après les avoir remerciés chaleureusement, Iôçeph sortit et traversa prestement la cour pour atteindre l’autre pièce de la maison. Il emportait avec lui les impressions profondes de cette conversation, qu’il savait importante pour la suite des choses. Il avait hâte d’en faire part à son épouse.

Mariam était en train d’installer l’Enfant pour la nuit. Quand Iôçeph la salua, le Nouveau-Né réagit au son de sa voix et saisit l’un des doigts de sa mère avec énergie. Mariam y perçut comme une demande ou encore une réponse, elle ne savait trop, alors que Iôçeph, obéissant à un instinct de tendresse indicible, se penchait au-dessus de l’Enfant pour confirmer sa présence: « C’est abba, ab-ba. »

Un grand vent s’était levé. Les eaux d’en haut se mirent à tomber et la pluie ruisselante pénétra le sol, consommant l’intimité des cieux et de la terre, fertilisant l’humus nourricier. Bénédiction.

Il plut abondamment. Les puits et les citernes furent remplis à ras-bord. Ce fut le deuxième jour

La première des semaines

Avant de quitter Nazareth, Iôçeph et Mariam avait déjà évoqué la possibilité de s’installer à Beit Lehèm, dans la ville du Roi-Mashiah. Les signes étaient là. Ils en firent part à leurs hôtes.

Iônatan avait remarqué une maison semi-abandonnée mais de bonne qualité, située juste à la sortie de la ville, qui offrait une vue magnifique sur les champs de blé de Beit Lehèm. Elle avait vraisemblablement appartenue à des notables car, contrairement aux maisons courantes, elle était fabriquée de briques.

C’était par contre une vieille maison, la maçonnerie était en piteux état, ainsi que le toit. Mais Iôçeph, de par son métier, pourrait la réparer aisément et Iônatan ne demandait qu’à l’aider. Elle était aussi un peu à l’écart des autres. Peut-être était-ce la raison principale pour laquelle elle demeurait inhabitée?

Comme il avait ses entrées partout à Beit Lehèm, Iônatan s’offrait pour trouver qui en était le propriétaire et lui faire part d’une éventuelle proposition d’achat. Si cette idée souriait à Iôçeph et Mariam, évidemment! C’était bien le cas. Alors tout s’enchaîna rapidement.

Iôçeph partait de grand matin. Avec Iônatan, il faisait les démarches nécessaires à l’acquisition de la maison. Il devait en même temps préparer la Berit mila de l’Enfant [6]. Comme la circoncision devait être pratiquée le huitième jour après la naissance, Léa et Iônatan avaient aimablement insisté pour que leurs invités profitent de leur hospitalité au moins jusque là.

Lorsque l’Enfant dormait et qu’aucune tâche ne la sollicitait, Mariam s’asseyait au dehors, tout près de la porte, pour jouir de la brise et du soleil réconfortant. C’est dans un de ces moments qu’elle fut prise d’un puissant émoi.

Comme sous l’effet d’une motion profonde, venue de l’intérieur, les évènements récents, que sa mémoire si vive avait recueillis et conservés dans son coeur, remontèrent à la surface et redevinrent présents.

Elle revoit le moment unique de la naissance de son Fils.

Le temps est comme élargi par la présence de Dieu. Elle sait que l’Enfant va naître mais son esprit est entièrement occupé par la Présence divine. Et soudain, comme mu par l’élan de son amour pour Iaoué, l’Enfant vient au monde dans la plus intime des douceurs.

À ce moment même où, dans les cieux, on contemple ce mystère ineffable, Mariam sent que s’accomplit ce qu’Ishaia avait annoncé:

Avant d’être en travail, elle a enfanté, avant que viennent les douleurs elle a accouché d’un garçon. Mais qui a jamais entendu rien de tel? Qui a jamais vu chose pareille? [7]

Une autre parole émerge aussitôt, celle de Iaoué-Élôïm à la femme: « C’est dans la douleur que tu enfanteras des fils ».

« Pourtant, pense Mariam, c’est bien sans douleurs que je viens d’enfanter. Quelle en est la raison? » Et elle laisse mûrir en elle la Parole.

Alors une autre question se superpose à la première: «Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme?».

La voix angélique lui avait répondu: «L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre, c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu.»

Le sens profond de cette réponse, que des mots ne sauraient rendre à eux seuls, lui apparaît tout à coup dans toute son envergure. Elle voit, dans son esprit, le Souffle d’Élôïm qui plane au-dessus des eaux primordiales. L’Esprit est comme une ombre au-dessus des eaux. L’Esprit est la source de toute Vie et Il l’avait prise sous son ombre…

Sur cette révélation, le temps avait repris son cours normal.

Depuis cet instant qui avait uni le temps et l’éternité, Mariam reposait dans la paix la plus profonde et son esprit méditait dans une lumière neuve.

Durant les sept premiers jours suivant la naissance d’un garçon, comme toute femme, elle ne pouvait aller à la synagogue, ni toucher aux objets sacrés, et quiconque la toucherait ou viendrait en contact avec le lieu où elle s’était couchée ou assise serait déclaré impur jusqu’au soir [8]. La Mère et le Fils devaient ainsi demeurer à l’écart, à la maison. Dans « le sang » de la naissance, disait-on parfois.

« Le sang de la naissance… » Pour Mariam, sang et purification allaient prendre un sens nouveau.

Ainsi, elle se demande quelle est la signification de l’impureté qu’on attribue à l’enfantement. Pourquoi est-elle considérée impure à la suite de l’accomplissement de la volonté d’Élôïm qui a dit : « Portez du fruit »?

Bien sûr, maintenant que, par la grâce de son Seigneur, elle a porté fruit, Mariam sait qu’il est sage de remplir les prescriptions de la purification comme l’a demandé l’Éternel, et elle le fera volontiers. Mais elle comprend, dans sa fibre la plus intime, que la véritable purification n’est pas extérieure mais intérieure. Elle doit être la soumission totale à la volonté de Dieu, jusqu’à la racine de l’être. La purification implique la circoncision du coeur.

Le jour de Berit mila approchait. Jour de circoncision de l’Enfant. Premier sang versé du sacrifice d’Alliance avec Élôïm.

Mariam intensifiait sa prière. Elle priait beaucoup pour son peuple, pour qu’il accomplisse sa vocation et réalise les fruits de son passage au désert. Se rappelant les quarante ans de cette pénible traversée marquée par les épreuves et les récriminations, elle-même vivrait sa quarantaine dans un désert intérieur marqué par la soif de Dieu.

Sous le souffle de l’Esprit, le cantique de sa prière se modulerait au fil des jours. Quarante jours de libre soumission.

Au Jour d’Alliance

Léa était venue chercher l’Enfant pour le conduire à la synagogue où Iôçeph et Iônatan s’étaient rendus plus tôt le matin. Celui dont l’Ange avait dit qu’il serait appelé « Fils du Très-Haut » serait circoncis selon la Loi, en signe d’alliance avec Iaoué, et on lui imposerait le Nom que l’Ange avait révélé à chacun des deux époux dans une Annonce.

Pendant ce temps, Mariam restait à la maison, selon les prescriptions de la loi, et elle attendait leur retour.

Comme toujours elle réfléchit et se souvient. Elle médite sur le sens de l’Alliance et, cette fois, ce sont les souvenirs de sa visite à Élisheva, sa cousine, qui lui reviennent. Celle-ci l’avait invitée à rester pour la Berit mila de son fils Iôhanan, afin que Mariam puisse partager la bénédiction de cette mitsva.

Les deux cousines étaient très proches. Combien de fois Élisheva n’avait-elle pas partagé à Mariam, lorsqu’elles avaient la joie de se rencontrer, les aspirations qu’elle nourrissait à l’égard de la venue du Mashiah!

Descendante d’Aarôn, Élisheva était imbue des Écritures et elle avait cette vibrance tranquille et sans prétention des justes, comme son époux Zekaria. La peine de n’avoir pu enfanter se dilatait dans l’espérance lorsqu’elle parlait avec sa jeune cousine de la maison de Daouid, cette lignée pour laquelle son époux avait lui aussi une véritable dévotion. Malgré la disgrâce dans laquelle la famille royale était tombée, tous deux restaient loyaux envers la lignée de la Promesse, à laquelle ils étaient de surcroît apparentée par alliance. Leur prière fervente montait sans cesse vers Iaoué, tel l’encens dans le sanctuaire.

Lorsque Mariam s’était présentée chez sa cousine, après l’Annonce, celle-ci l’avait accueilli avec transport.

Bénie es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein! Et comment m’est-il donné que vienne à moi la mère de mon Adôn? Car, vois-tu, dès l’instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en mon sein. Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part de Adôn! [9]

Élisheva s’était ainsi faite prophétesse. Pour Mariam, il fallait que l’Esprit de Dieu lui-même ait mis ces mots en sa bouche. Et cet évènement déclencha chez elle un tel élan de reconnaissance qu’elle ne put que s’écrier:

Le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses! Il est venu en aide à Israël, son serviteur, se souvenant de sa miséricorde, en faveur d’Avraâm et de sa postérité à jamais! [10]

Aujourd’hui – comme alors – en cette fête de l’Alliance du Fils de Dieu avec Dieu lui-même, l’esprit de Mariam exulte!

Mariam se souvient aussi de Zekaria qui était resté muet depuis sa propre Annonce. Un ange l’avait visité alors que, désigné par le sort selon la coutume sacerdotale, il était entré dans le sanctuaire pour y brûler l’encens. Le Messager lui avait dit:

Sois sans crainte, Zekaria, car ta supplication a été exaucée; ta femme Élisheva t’enfantera un fils, et tu l’appelleras du nom de Iôhanan (Jean). [11]

Mariam sait que Zekaria est devenu muet parce qu’il n’a pas cru en la parole de l’Envoyé, mais tout arriva comme l’Ange l’avait dit. Et Élisheva, comme elle aujourd’hui, avait attendu à la maison, au jour de la Berit mila, le retour d’un fils dont le nom avait été imposé par le ministère angélique, avant même sa conception. Ainsi, les deux lignées convergeaient-elles dans leurs missions pour l’avènement du salut promis à Israël.

À Zekaria, l’Envoyé des cieux avait dit que Iôhanan marcherait devant Iaoué avec l’esprit et la puissance d’Éliaou (Élie), qu’il ramènerait le coeur des pères vers les enfants et les rebelles à la prudence des justes, préparant à Iaoué un peuple bien disposé [12]. Quand Zekaria eut retrouvé la voix et rapporté fidèlement les paroles de l’Ange, tous pensèrent au prophète Malachie qui s’était exprimé de la même manière pour annoncer le Jour de Iaoué. [13]

« Préparant à Iaoué un peuple bien disposé… » Parole d’espérance que Mariam se répète en ce jour. Le peuple de Dieu est en marche!

La naissance du fils de Élisheva et Zekaria, les merveilles qui l’entourèrent, avaient marqué profondément tous ceux qui en avaient eu connaissance [14]. Mais l’Évènement était demeuré pour ainsi dire scellé dans le coeur de chacun. L’Enfant-Prophète de Ein Kerem, encore tout petit, devait croître. Comme aussi devait croître l’Enfant-Roi de Beit Lehèm…

Le fil de la méditation de Mariam se rompit subitement. Elle voit, dans la lumière, une petite troupe qui avance. Ils sont de retour! Léa et Iônatan saluent les gens sur le pas de leurs portes. Un vent léger balaye le chemin et fait lever une poussière dorée qui forme comme un voile, ou plutôt un dais au-dessus du groupe. Et de ce groupe l’homme, son époux, avance fièrement portant l’Enfant dans ses bras.

Et l’homme est beau. Sa démarche est sûre et paisible. Et Mariam pense:

Qu’a donc ton bien-aimé de plus que les autres, ô la plus belle des femmes?
Qu’a donc ton bien- aimé de plus que les autres, pour que tu nous conjures de la sorte?

Mon bien-aimé est frais et vermeil. Il se reconnaît entre 10.000.

Sa tête est d’or, et d’un or pur; ses boucles sont des palmes, noires comme le corbeau.
Ses yeux sont des colombes, au bord des cours d’eau se baignant dans le lait, posées au bord d’une vasque.
Ses joues sont comme des parterres d’aromates, des massifs parfumés. Ses lèvres sont des lis; elles distillent la myrrhe vierge.
Ses mains sont des globes d’or, garnis de pierres de Tarsis. Son ventre est une masse d’ivoire, couverte de saphirs.
Ses jambes sont des colonnes d’albâtre, posées sur des bases d’or pur. Son aspect est celui du Liban, sans rival comme les cèdres.
Ses discours sont la suavité même, et tout en lui n’est que charme.

Tel est mon bien-aimé, tel est mon époux, filles de Iéroushalaïm. [15]

Iôçeph est vraiment le Fils de Daouid! C’est ainsi que l’Ange du songe s’est adressé à lui. Contemple-t-elle en Iôçeph les traits futurs du Nouveau-Né, aboutissement de cette lignée préparée depuis longtemps par Iaoué? Elle voit l’Enfant, tout à fait éveillé et calme, qui tient à pleine main la barbe de son père, comme s’il s’était forgé, entre le père et le fils, à cause de l’évènement qui vient de se produire, un lien nouveau, une alliance, signe de l’Alliance. Son bien-aimé devient alors à ses yeux l’image même du Père unique.

El Shadaï avait dit à Avraâm:

Je te fais père d’une multitude de nations.
Je te rendrai extrêmement fécond, de toi je ferai des nations, et des rois sortiront de toi.
J’établirai mon alliance entre moi et toi, et ta race après toi, de génération en génération, une alliance perpétuelle, pour être ton Dieu et celui de ta race après toi. [16]

Isaac avait été le premier enfant à être circoncis à ses huit jours, selon les prescriptions de El Shadaï. Iôçeph aimera son fils comme Avraâm avait aimé Itshaq, Mariam le sait. Mais est-ce que son fils lui sera demandé comme il fût fait à Avraâm?

L’homme dirige son regard vers la maison et aperçoit la femme, Mariam, debout dans le soleil, et il sourit.

Alors Mariam prononce, pour la première fois, ces noms qui ont une saveur si suave en sa bouche: « Iéshoua bèn Iôçeph bèn Daouid bèn Adam ». Oui, Iéshoua est Fils de l’Homme, Fils du Très-haut! Telle fut la pensée de Mariam. Il n’y eut que ce Iaoué-Père prophétisé par Ishaia qui en connut tout le retentissement.

Tu es notre père. Si Abraham ne nous a pas reconnus, si Israël ne se souvient plus de nous, toi, Yahvé, tu es notre père, notre rédempteur, tel est ton nom depuis toujours. [17]

D’une Berit mila à l’autre, l’Alliance divine fut scellée. Deux petits enfants avaient été appelés, l’Aîné annonçant le Cadet.

Il y eut Berit mila, jour d’Alliance. Ce fut le huitième jour.

La vigile des jours

La première semaine, Iôçeph avait passé de longues heures à l’extérieur, ne revenant qu’au coucher du soleil. Il semblait très affairé mais ne parlait guère de ses journées. Mariam respectait son silence. Elle savait qu’il ne lui cachait rien pas plus qu’elle-même d’ailleurs. Elle sentait chez lui une sorte de paix et même une joie nouvelle. Il vivait vraisemblablement ces propres moments de grâces avec l’intensité qu’elle lui connaissait. Elle n’allait certainement pas s’immiscer.

Au lendemain de la Berit mila de Iéshoua, Iôçeph, au lever, arborait un sourire radieux et transpirait le bonheur. Il avait une surprise pour Mariam.

Selon leurs voeux, il avait pu acquérir la maison située juste à la sortie de la ville dont la cour donnait sur les champs de blé de Beit Lehèm. Grâce au talent de négociation de Iônatan et aussi grâce à la générosité de ses hôtes, la petite famille était désormais propriétaire d’une nouvelle maison. Iônatan et Léa avaient en effet décidé de payer le coût total de la maison, poussés par la grâce et la certitude de faire ainsi un geste qui serait agréé de Iaoué.

Encore une fois, le Très-haut avait pourvu ceux qui lui faisaient confiance.

Après avoir béni Shadaï et remercié Léa et Iônatan pour leur hospitalité et leur don qu’ils ne pouvaient refuser, Iôçeph et Mariam firent à nouveau leurs bagages et, l’âne bien chargé, ils partirent avec Iéshoua, à l’heure discrète de la sieste. Mariam tenait l’Enfant dans ses bras et elle marchait à la suite de son époux. Iôçeph les précédait un peu, le pas léger, avec son ami l’âne qui portait son fardeau avec aisance.

Arrivé devant la maison, Iôçeph s’arrêta devant la porte pour laisser à Mariam le temps de savourer cet autre moment de grâce. Ils avaient leur gîte. Et quel gîte! Mariam comprit les longues heures d’absence de Iôçeph et sa réserve. Elle savait évidemment qu’il s’était empressé de rénover la masure pour la rendre habitable. Mais ce qu’elle découvrait était déjà beaucoup plus qu’une demeure « habitable ».

Au moment d’y entrer, Mariam s’aperçut que Iôçeph avait planté un clou à côté de la porte, à l’endroit où l’on installe ordinairement la mezuza. Elle l’approuva du regard. Elle lui remit Iéshoua et alla toute souriante chercher dans les bagages la mezuza qu’elle avait pris soin d’apporter de Nazareth. Elle revint ensuite l’accrocher au cadre de la porte.

Iôçeph s’approcha avec Iéshoua. D’un coeur unanime, Mariam et lui touchèrent tour à tour la mezuza. La famille pouvait maintenant entrer dans cette maison dont Shadaï était le maître Tout-Puissant [18].

Depuis les jours d’Annonciation, Iôçeph et Mariam étaient passés d’une maison à l’autre, d’un abri à l’autre. Shadaï seul était le lieu de leur repos, où qu’ils soient, comme il est dit dans le Psaume: « Qu’à jamais je loge sous ta tente et m’abrite au couvert de tes ailes! » [19]

Mais une autre surprise attendait Mariam. Il y avait, sur le toit en terrasse de leur nouvelle maison, une sorte de petit pavillon, une chambre haute, à laquelle on accédait par un escalier, de l’intérieur. C’est cette particularité qui avait définitivement convaincu Iôçeph d’acquérir la maison. Comme la shunamite l’avait fait à l’égard du prophète Élisée, il pouvait ainsi offrir à son épouse un lieu pour se retirer et prier. [20]

Les jours de purification n’étant pas terminés pour Mariam – il en restait trente-trois encore -, Iôçeph s’était dit qu’elle apprécierait cet espace supplémentaire, particulièrement propice au recueillement, et il avait mis un soin particulier à l’aménager.

Mariam adressa à son époux un regard entendu, rempli de joie. Oui, il lui avait vraiment fait plaisir. Elle s’avança et fit le tour de la pièce, appréciant chaque détail.

Dans sa mémoire, Iôçeph revit Judith qui avait elle-même vécu plus de trois ans retirée dans sa maison. Depuis la chambre haute qu’elle s’était aménagée sur la terrasse, elle avait prié et jeûné aux jours de son veuvage, et, aux jours de péril, elle avait relevé le courage de son peuple abattu. Cette chambre haute lui apparaissait soudain comme une tour de garde où Mariam, tel un guetteur, se tiendrait devant Shadaï, dans l’attente d’une mission à venir. [21]

Dans les bras bienveillants de Iôçeph, l’Enfant remua légèrement. Et Iôçeph pressentit lui-même, comme à travers un voile, l’appel de sa propre destinée.

Jours de retraite, jours de vigile.

Le quotidien

La restauration de la maison de briques avait fait sensation dans Beit Lehèm.

Durant toute la semaine où Iôçeph et Iônatan y avaient travaillé avec ardeur et bonne humeur, plusieurs étaient venus faire leur tour pour voir la progression des travaux. Les connaisseurs hochaient la tête en signe d’appréciation.

Très vite, tous surent qu’une jeune famille allait y emménager. Il y avait bien une certaine curiosité les concernant, mais Iônatan, comme Léa d’ailleurs, étaient très habiles à conserver la discrétion souhaitée par Mariam et Iôçeph. « Ce sont des Galiléens », répondaient-ils invariablement à ceux qui les questionnaient. Cette réponse entraînait toujours un petite déception chez l’interlocuteur suivie d’un désintérêt: « Ah bon… »

Ce désintérêt providentiel n’avait pas eu pour effet de décourager les visites. La Famille venaient à peine d’arriver que déjà les voisins vinrent présenter leurs voeux de bienvenue, apportant quelques cadeaux, offrant quelques menus services. À la vue du nouveau-né, chacun s’extasiait et félicitait les parents.

Les visites continuèrent jusqu’au soir, si bien que lorsque Léa et Iônatan passèrent les voir, il y avait encore un petit attroupement à la porte de la maison.

Iônatan et Léa n’en revenaient pas de voir ces gens qu’ils connaissaient si bien prendre une attitude de respect presque révérencieuse envers des étrangers, Galiléens de surcroît. Les Judéens éprouvent en général un certain mépris pour les gens du Nord. Pourtant, aucun d’eux ne semblaient au courant des véritables origines de cette famille, ni faire le lien avec ce qu’avaient raconté des bergers encore tout récemment.

Ce qui était plus frappant encore, c’était l’amabilité avec laquelle Iôçeph et Mariam accueillaient chacun. Un accueil plein de spontanéité et de bienveillance souriante.

Le lendemain, tout retourna, pour ainsi dire, dans l’ordre du quotidien. Iôçeph allait poursuivre les dernières réparations de la maison et trouverait quelqu’embauche pour subvenir aux besoins de sa famille.

Mariam, constamment présente à la grâce qu’elle et son époux vivaient, s’affairait gaiement, ajoutant sa touche à l’aménagement de la maison. L’ordre qui s’en dégageait était remarquable, sobre sans austérité. Certains éléments venaient agrémenter l’ensemble qui, bien que très simple, donnait une impression de richesse. Il y faisait bon vivre.

Mariam faisait évidemment son apprentissage de mère. Elle profitait beaucoup des conseils de Léa.

À travers les gestes du quotidien, il s’établissait progressivement entre Mariam et son fils un dialogue enjoué, ponctué de la part de l’Enfant de petits bruits de bouche et de frétillements expressifs. Les rires de sa ima provoquaient invariablement chez lui un surcroît d’animation.

Léa souriait souvent en les regardant. Elle se revoyait elle-même jeune ima. Quels bonheurs furent les siens! Mais il y avait entre Mariam et son fils quelque chose de nouveau qu’elle n’arrivait pas à définir, un rapport si naturel et sain. Même les pleurs de l’Enfant semblaient entrer dans l’ordre harmonieux des choses.

En d’autres temps, d’autres lieux, elle se serait sentie importune dans ses visites, surtout aux jours de la quarantaine suivant une naissance. C’était tout le contraire. Le jeune couple était d’une telle cordialité! On se sentait aussitôt bienvenu sans être retenu ni contraint par quoi que ce soit.

Léa revenait de ses visites comme contentée, chaque fois plus désireuse de servir le dessein providentiel qui avait conduit cette famille princière dans leur maison. Iônatan lui aussi allait s’épanouissant. Chaque jour, chaque évènement de leur ordinaire, était devenu si plein, si riche.

Puis vint le moment du départ. Iônatan et Léa avait retardé leur retour à Iéroushalaïm de quelques semaines pour seconder la jeune famille.

Leur décision de s’établir à Iéroushalaïm avait eu beaucoup à voir avec un certain vacillement de leur espérance. En acceptant l’hospitalité de leur fils, ils avaient voulu se rapprocher du Temple, dans l’espoir de ranimer leur ferveur. Mais le Temple lui-même était devenu un tel sujet de scandales! Lieu de marchandage éhonté, on y honorait Iaoué des lèvres mais pas du coeur.

Maintenant, tous deux étaient remplis d’expectative à la pensée de monter au Temple! Ils iraient louer Iaoué de ce tout ce qu’ils avaient vu, entendu, vécu. Ils se sentaient appeler à demeurer en sa présence, dans l’attente du plein accomplissement de sa Promesse!

Mariam aimait Léa et Iônatan. Bien que moins âgés que ses cousins, ils lui rappelaient beaucoup Élisheva et Zekaria. Léa avait été un réel soutien pour elle, comme Iônatan, elle le savait, l’avait été pour Iôçeph. Mais il y avait davantage.

En les voyant s’éloigner, elle pensait à ce petit reste en Israël demeuré fidèle à Iaoué. Elle s’émerveillait de voir l’effet qu’avait eu sur eux la nouvelle de la naissance du Rejeton de Daouid. Leurs visages s’étaient comme éclairés et ils débordaient de vitalité.

Annoncée par l’Ange, la sainteté du Nouveau-Né rayonnait déjà.

Mariam elle-même l’avait éprouvée. La première fois que l’Enfant avait ouvert les yeux, elle avait senti comme un fleuve de joie et de bonheur l’envahir, jusqu’à l’immerger toute entière. Sous l’effet de cette marée intérieure, un nom s’était formulé doucement en elle et sur ses lèvres.

Le Nouveau-Né, encore imprégné des réalités informulables perçues au sein des eaux maternelles, ne discernait pas encore clairement les images de ce monde. Mais il pouvait entendre. Il écouta avec intensité la voix de sa « ima » qui répétait, jubilante: « Iaoué… Iaoué… »

La louange de Mariam avait surgi aux oreilles de l’Enfant, et elle surgirait, à nouveau, pour lui apprendre à reconnaître le Nom du Très-Haut et saisir sa Présence environnante.

C’est ainsi que le quotidien des gestes et des paroles allait concourir à sa croissance.

Jour après jour.

La maison du pain

La maison de Iôçeph est bien organisée. Il est parvenu non seulement à la réparer mais à l’équiper comme il se doit. Ainsi Mariam peut-elle se livrer à l’une de ses activités favorites, la préparation des repas.

Il y a tout ce qu’il faut. De la viande, du veau et du mouton, des fèves et des lentilles, l’huile d’olive et le sel. Des figues et des fruits secs et même du raisin frais. C’est l’abondance. Mariam est comblée.

Il y a aussi, bien entendu, de l’orge et du froment. Et chaque matin, Mariam se met à l’oeuvre.

Pour Iôçeph, c’est l’un des plus beaux moments de la journée.

Il s’accroupit dans sa posture favorite, dos au mur, les bras sur les genoux, et il observe avec ravissement son épouse préparer le pain quotidien qui les rassasiera plus tard. Il ne peut s’empêcher de savourer à l’avance ce don que le Seigneur offre, signe de sa bonté.

Mariam prend toujours trois mesures de farine, bien tassées. Elle y mélange un peu de sel. Elle mélange aussi le levain avec un peu d’eau. Elle ne mesure jamais le levain.

Ensuite, elle incorpore lentement le levain à l’eau et la farine, suivant un rythme des mouvements constant. Ses gestes sont sûrs et précis. Elle sait aussi quand la pâte est prête.

Iôçeph se laisse entraîner par le rythme régulier des gestes de Mariam, le bruit de sa paisible respiration. De temps en temps, il jette un coup d’oeil à l’Enfant qui repose dans son panier d’osier, et son esprit se met à flotter au gré d’un vent secret.

La naissance de Iéshoua est un mystère inouï. Des Anges de Iaoué se sont manifestés, comme à Avraam qui les avait reçus à Mambré. En signe d’hospitalité, il avait demandé à son épouse, Sara, de fabriquer du pain avec trois mesures de farine.

Et puis, quel est donc le sens de cette convergence qui les a amenés ici, à Beit Lehèm, et à s’y installer?

Cette décision leur est venue naturellement, même si Mariam elle-même possède une maison à Nazareth. Car ils connaissent bien le passage du prophète Mika :

Et toi, Bethléem Ephrata, le moindre des clans de Juda, c’est de toi que me naîtra celui qui doit régner sur Israël; ses origines remontent au temps jadis, aux jours antiques.
C’est pourquoi il les abandonnera jusqu’au temps où aura enfanté celle qui doit enfanter. Alors le reste de ses frères reviendra aux enfants d’Israël.
Il se dressera, il fera paître son troupeau par la puissance de Yahvé, par la majesté du nom de son Dieu. Ils s’établiront, car alors il sera grand jusqu’aux extrémités du pays.

Juste avant d’évoquer la vocation de Beit Lehèm, Mika s’était écrié: « Debout! Foule le grain, fille de Sion! » [22] L’heure aurait-elle sonnée? L’ennemi avait foulé la création d’Élôïm sous ses pieds, serait-ce l’heure de fouler le grain pour qu’il puisse y avoir du pain? Faudra-t-il aussi fouler le raisin pour qu’il y ait du vin?

Le salut passe par l’immolation. Et il passe par la fermentation. Le levain dans la pâte et le vin. Ainsi se dévoilent les grands secrets d’Élôïm.

Lorsque le peuple d’Israël s’est enfui d’Égypte, Iaoué avait interdit de mettre du levain dans la pâte. Le pain azyme, c’est le pain de l’exode. Car toute fermentation est ambiguë. Elle peut enrichir mais aussi corrompre. Mais celui qui met juste la bonne quantité de levain produit le pain quotidien qui est le pain de la joie.

Iôçeph regarde Mariam pétrir la pâte. Elle le fait avec un art consommé. Ses mains et ses doigts travaillent avec un mélange de force et de grâce qui lui est unique. Iôçeph sait que le résultat sera inégalable. Même sa propre mère ne faisait pas un aussi bon pain. Qui a-t-il donc en cette femme qui lui permet de faire l’exceptionnel de l’ordinaire?

Peu à peu, Iôçeph voit en elle l’image d’Élôïm. Élôïm n’est-il pas celui qui pétrit la pâte que nous sommes? N’est-ce pas lui qui a pétri la pâte qu’est son peuple Israël?

D’un Shabbat à l’autre

Le temps s’écoule sereinement, les journées et les nuits se font un peu plus fraîches. De semaine en semaine, la jeune famille célèbre ce qu’on appelle, en pensant au prophète Osée, les noces du Shabbat. Moment d’intimité entre Élôïm et son peuple, entre l’Époux et l’Épouse. [23]

Juste avant le coucher du soleil, l’intérieur des maisons de Beit Lehèm s’illumine pour accueillir le repos de l’Éternel. C’est Mariam qui allume le chandelier. Sur la table dépouillée, Iôçeph a déposé la coupe de vin pour les bénédictions. À l’unisson l’un et l’autre, Mariam et Iôçeph chantent les psaumes, louant les jours de la Création et le jour sanctifié par Élôïm. Dans son petit lit, l’Enfant, les yeux clos, sourit aux Anges en entendant leurs voix familières.

Au matin du Shabbat, au retour de la synagogue, Iôçeph monte rejoindre Mariam et Iéshoua à la chambre haute. Et là, les époux méditent et échangent sur la Parole du Jour tirée de la Torah et des écrits des Prophètes.

Mariam goûte ces moments. Elle a une mémoire parfaitement fidèle des Écritures comme des Évènements. Elle conserve tout dans son coeur: rien ne périt, rien ne s’y corrompt, tout germe à son heure.

Iôçeph et elle ont constamment faim et soif de communier au projet de Iaoué-Élôïm qu’ils découvrent inscrit dans sa Parole. Avec sagesse, ils rapprochent, les uns des autres, certains passages des Écritures qui alors prennent vie et révèlent quelque trait de la mission de ce Mashiah dont ils se sont vus confier la croissance et la garde.

Mariam vit la quarantaine de purification qui lui avait été accordée à titre de mère à l’unisson de celles des Hébreux en marche vers la Terre promise, et du prophète Éliaou en marche vers l’Horeb. Elle aime se tenir devant Shadaï pour méditer ses voies. L’espérance toujours en éveil, elle laisse pénétrer en elle les promesses des Prophètes, particulièrement celle d’Ishaia dont l’accomplissement lui est si intime.

Comme un jeune homme épouse une vierge, ton bâtisseur t’épousera. Et c’est la joie de l’époux au sujet de l’épouse que ton Dieu éprouvera à ton sujet. » [24]

Depuis la chambre haute, l’Épousée contemple les champs de blé de Beit Lehèm, la « maison du pain », évoquant le travail de la terre depuis l’ensevelissement des grains jusqu’à la moisson des épis. Iaoué n’a-t-il pas juré, par sa droite et son bras puissant, que le blé et le vin ne seraient plus donnés aux ennemis ni aux étrangers, mais aux moissonneurs et aux vendangeurs de son peuple? [25]

Le prophète Ishaia, qui lui est si cher, accorde une attention toute particulière au vin, ce vin nouveau et mystérieux dont il s’est fait le chantre:

Que je chante à mon bien-aimé le chant de mon ami pour sa vigne.
Mon bien-aimé avait une vigne, sur un coteau fertile.
Il la bêcha, il l’épierra, il y planta du raisin vermeil.
Au milieu il bâtit une tour, il y creusa même un pressoir.
Il attendait de beaux raisins: elle donna des raisins sauvages.

Eh bien! La vigne de Yahvé Sabaot, c’est la maison d’Israël,
et l’homme de Juda, c’est son plant de choix. [26]

Mariam sent ses entrailles frémir pour la maison d’Israël, et son coeur pour la tribu de Juda. Un jour, cette vigne donnera les plus beaux raisins et ce jour est proche! Alors se profile le portrait de ce Serviteur dont la souffrance rédemptrice trouve un écho si profond en elle. Mariam et Iôçeph connaissent par coeur la description qu’en donne le Prophète. Mais le silence continue d’envelopper ses paroles, l’identité du Serviteur demeurant cachée. [27]

Pour l’heure présente, le nom qui vient aux lèvres de Mariam est celui de cet Enfant dont la mission a été révélée à Iôçeph: « Tu l’appelleras du nom de Iéshoua, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés », avait dit l’Ange.

Ainsi les jours de Shabbat se prolongent et finissent par ne faire qu’un avec tout le temps. Mariam et Iôçeph sont constamment dans le temps de Dieu. Son Jour est tous les jours.

Ils parviennent ainsi au jour quarantième. Le soleil est presqu’à son midi. Après avoir lavé Iéshoua, Mariam le revêt d’une petite tunique de lin qu’elle a confectionnée, afin qu’il soit à l’aise et au chaud. Demain, ils partiront tôt pour Iéroushalaïm où le Premier-né sera présenté au Temple, comme le demande la Torah.

Alors qu’elle le dépose dans son petit lit, le regard de l’Enfant se fait soudain plus vif. Il se plante résolument dans le sien. Clairement, Iéshoua la regarde. Délibérément. Puis, il lui sourit. Ineffablement. Iôçeph étant un peu plus loin, Mariam l’appelle. Lorsqu’il s’approche, Iéshoua tourne la tête vers lui, le regarde intensément et sourit à nouveau. Pleine reconnaissance. Félicité.

La Quarantaine est accomplie. Jour d’épanouissement.

Délivrance

Le court voyage pour se rendre à Iéroushalaïm a été agréable. La journée est fraîche et ensoleillée.

Au Temple, il n’y a pas autant de pèlerins que lors des festivités de Soukkot. Les vendeurs sont toujours sur la place, mais moins nombreux et moins bruyants. Iôçeph achète les deux colombes qui doivent être offertes en sacrifice pour le rachat de Iéshoua.

Pour Iéshoua et Mariam, c’est jour de délivrance. Les prescriptions de la Loi requises pour la présentation du Fils premier-né et conclure le temps de purification de la Mère sont entreprises avec foi et une parfaite soumission au projet d’Élôïm.

Alors qu’ils montent les marches du Temple, un saint de Iaoué vient à leur rencontre. Rendue près de lui, Mariam, mue de l’intérieur, lui présente l’Enfant. Cet homme juste le reçoit dans ses bras et bénit Iaoué à haute voix:

Maintenant, Souverain Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s’en aller en paix. Car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël. [28]

Son nom est Shimaôn et l’Esprit d’Élôïm, à l’évidence, repose sur lui. Ce qu’il dit ensuite de l’Enfant et de sa Mère pénètre douloureusement en Iôçeph qui contemple la scène. Iéshoua regarde de tous ses yeux le visage animé de Shimaôn annonçant les contradictions à venir qui le concernent et Mariam ne semble pas autrement troublée par l’annonce de ce glaive qui doit lui transpercer le coeur. Elle écoute avec cette intensité qui rend son silence si éloquent.

En cette même heure survient Hana, veuve et prophétesse, poussée elle aussi par l’Esprit d’Élôïm. Elle annonce l’Enfant-Mashiah et la délivrance de Iéroushalaïm avec des paroles qui sont comme des échos de celles d’Ishaia.

Sur le chemin du retour, Mariam et Iôçeph gardent le silence, ne le rompant que pour partager leur étonnement devant ce qui a été dit de Iéshoua. Ils sont familiers de la promesse faite à Daouid concernant le Mashiah, du salut promis à Israël. Mais les paroles prophétiques de Hana et Shimaôn ont ouvert des horizons qui leur étaient jusqu’alors inconnus.

Mariam voit que le souffle d’Élôïm promis par l’Envoyé est là, toujours, les prenant sous son ombre, et que cette ombre de vie se manifeste sur les personnes qu’ils rencontrent: Élisheva et Zekaria, Iônatan et Léa, Shimaôn et Hana. Le souffle d’Élôïm plane au-dessus du monde. Il plane au-dessus de la Famille.

Sans qu’elle en comprenne tout le sens, un oui encore informulé mais déjà sollicité sera le fruit prédestiné de cette Quarantaine. À l’heure du glaive, en Mariam, la mère ne posera aucun obstacle à la servante de Iaoué. L’élan de son adhésion sera toujours le même.

Le soir venu, sur sa couche, Iôçeph baigne encore dans la gloire de Iaoué qui s’est manifestée en ce jour. La douleur éprouvée au Temple s’est apaisée, comme en dormance. « Lumière des nations », songe-t-il, et il voit défiler devant ses yeux des peuples nombreux, des rois, des multitudes de chameaux, apportant l’or et l’encens, tous proclamant les louanges de Iaoué jusqu’aux confins de la terre, comme l’a décrit Ishaia. [29]

Puis le visage de Shimaôn lui revient en mémoire. Le prophète avait parlé de l’Enfant et de sa Mère. Pas un mot sur Iôçeph dans le combat à venir qu’il a évoqué. Après avoir remis l’Enfant à ses parents, Shimaôn avait cependant laissé son regard se poser sur lui, tout en conservant le silence.

Iôçeph a déjà pénétré dans les franges du sommeil lorsqu’il comprend et qu’une force l’investit. Il n’est pas exclu de ce combat, mais impliqué dès maintenant. C’est à lui qu’il revient de soutenir et de protéger l’Enfant et sa Mère.

Jusqu’à l’Heure fixée.

Lendemains

Le prophète avait dit: « Avant que viennent les douleurs… »

Les temps et les jours portent aussi le maintenant et le demain. La douceur de la naissance de l’Enfant ne peut exclure les douleurs d’un enfantement à venir. Car il est aussi écrit: « Peut-on mettre au monde un pays en un jour? Enfante-t-on une nation en une fois? » [30]

Il y a déjà une douleur en Mariam, sourde et vive, mais féconde. Elle souffre de voir, jour après jour, un peuple tout entier, son peuple, offrir le sang des sacrifices et se laver dans les eaux des piscines en guise de purification, sans avoir un regard pour l’Auteur de toutes choses. Comme le déplorait déjà le Prophète, tourné vers les autels qu’il a fabriquées, Israël n’entend plus celui qui le juge et le régente, celui qui est son roi et son sauveur. [31]

Telle une épouse infidèle, il a perdu son amour d’autrefois et la victoire des oppresseurs a tari son espérance en la Promesse.

Mais l’Ange l’a assuré: « Rien n’est impossible à Dieu. »

Aux lendemains de quarantaine, la prière de Mariam ira s’élargissant, se faisant toujours plus pressante.

Que vienne ce jour où l’homme regardera vers son créateur, où ses yeux se tourneront vers le Saint d’Israël, et non plus vers les autels, oeuvres de ses mains! Que vienne ce jour où, véritablement purifiés, les sourds entendront et les aveugles verront! Que vienne ce jour annoncé par Ishaia, où tous les enfants seront disciples de Iaoué! [32]

– « Grand sera leur bonheur… »

Intime conviction.

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Séquences de vie cachée

Avant-propos
Avertissement des auteurs
Mariam à l’aube

Iôçeph au réveil

Marche vers Beit Lehèm
Quarantaine
Le Secret du Roi

Au pas des exilés

Premiers mots. (Devarïm)

Index des noms hébreux


[1] Genèse 49, 25-26.

[2] « Shalom » : Cette salutation connue chez les Hébreux depuis des temps immémoriaux est beaucoup plus profonde que ce que l’on en perçoit aujourd’hui, car le mot « shalom » ne signifie pas seulement « paix », mais d’abord « complétion », « complétude ».

[3] Isaïe 32, 20.

[4] En hébreu, Iônatan signifie : « Dieu a donné », et Léa : « Celle qui donne ».

[5] « C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe: Voici, la jeune femme est enceinte, elle va enfanter un fils et elle lui donnera le nom d’Emmanuel. » (Isaïe 7, 14) Le nom « Immanou El » en hébreu, qui se traduit « Emmanuel » en français, signifie « Dieu avec nous » (cf. Matthieu 1, 23).

[6] « Berit mila » désigne le rite de circoncision et signifie précisément : « Alliance par la circoncision ». Elle est mentionnée pour la première fois en Gn 17, 10 quand Shadaï déclare à Abraham: « Et voici mon alliance (berit) qui sera observée entre moi et vous, c’est-à-dire ta race après toi: que tous vos mâles soient circoncis. »

[7] Isaïe 66, 7-8a.

[8] Dans le cas de la mise au monde d’une fille, on double le nombre de jours de purification.

[9] Luc 1, 42-45.

[10] Luc 1, 49 et 54-55.

[11] Luc 1, 13.

[12] Luc 1, 17.

[13] « Voici que je vais vous envoyer Élie le prophète, avant que n’arrive le Jour de Yahvé, grand et redoutable. Il ramènera le coeur des pères vers leurs fils et le coeur des fils vers leurs pères, de peur que je ne vienne frapper le pays d’anathème. » (Malachie 3, 23-24)

[14] « La crainte s’empara de tous leurs voisins, et dans la montagne de Judée tout entière on racontait toutes ces choses. Tous ceux qui en entendirent parler les mirent dans leur coeur, en disant: ‘Que sera donc cet enfant?’ Et, de fait, la main du Seigneur était avec lui. » (Luc 1, 65-66)

[15] Ct 5, 9-16.

[16] Gn 17, 5-7.

[17] Isaïe 63, 16.

[18] La mezuza (mezuzah) est un petit parchemin sur lequel est inscrite la Parole du « Shema Israël »: « Shema Israël (Écoute, Israël): Yahvé notre Dieu est le seul Yahvé. Tu aimeras Yahvé ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir. Que ces paroles que je te dicte aujourd’hui restent dans ton coeur! Tu les répèteras à tes fils […] tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes. » (Deutéronome 6, 4-7a et 4,9). Le parchemin est enroulé et déposé dans un caisson. Sur le caisson de la mezuza se trouve la lettre « shin », lettre qui initie aussi le « Shema Israël » qui se trouve lui-même inscrit sur le parchemin inséré à l’intérieur du caisson. Mais il s’agit de surcroît de la première lettre de « Shadaï », un autre nom de Dieu tel que le connaissaient Avraâm, Itshaq et Iaqov.

[19] Psaume 61 (60), 5.

[20] « Un jour qu’Élisée passait à Shunem, une femme de qualité qui y vivait l’invita à table. Depuis, chaque fois qu’il passait, il se rendait là pour manger. Elle dit à son mari: ‘Vois! Je suis sûre que c’est un saint homme de Dieu qui passe toujours par chez nous. Construisons-lui donc une petite chambre haute avec des murs, et nous y mettrons pour lui un lit, une table, un siège et une lampe: quand il viendra chez nous, il se retirera là.’ » (2 Rois 4, 8-10).

[21] Livre de Judith, chapitre 8.

[22] Michée 5, 1-3 et Michée 4, 13.

[23] « De nouvelle lune en nouvelle lune, et de sabbat en sabbat, toute chair viendra se prosterner devant ma face, dit Yahvé. » (Isaïe 66, 23)

[24] Isaïe 62, 5.

[25] Isaïe 62, 8-9.

[26] Isaïe 5, 1-2 et 5, 7.

[27] Isaïe 53, 2-12.

[28] Luc 2, 29-32.

[29] « Debout! Resplendis! Car voici ta lumière, et sur toi se lève la gloire de Yahvé. Tandis que les ténèbres s’étendent sur la terre et l’obscurité sur les peuples, sur toi se lève Yahvé, et sa gloire sur toi paraît. Les nations marcheront à ta lumière et les rois à ta clarté naissante. Alors, tu verras et seras radieuse, ton coeur tressaillira et se dilatera, car les richesses de la mer afflueront vers toi, et les trésors des nations viendront chez toi. Des multitudes de chameaux te couvriront, des jeunes bêtes de Madiân et d’Epha; tous viendront de Saba, apportant l’or et l’encens et proclamant les louanges de Yahvé. » (Isaïe 60, 1-3 et 5-6)

[30] Isaïe 66, 8b.
[31] Isaïe 22, 11; Isaïe 33, 22.
[32] Isaïe 17, 7-8; Isaïe 29, 18; Isaïe 54, 13.

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5 Responses to Quarantaine

  1. Anne dit :

    Bonjour […],
    Suite à une première lecture, la phrase suivante m’est restée gravée dans l’esprit:
    ‘ À cette heure, comme toujours, Mariam ne présume de rien. En ce qui la concerne, elle ne spécule jamais. Elle écoute. Elle veille. Elle cherche la volonté du Tout-Puissant et se dispose à l’accomplir, quelle qu’elle soit.’
    Et une prière me vient de demander à Mariam de m’enseigner cette disposition du coeur(chair) et de l’esprit.

    (Note: Ce commentaire a d’abord été publié Samedi, 26 avril 2014 à 13:06, à la suite de la première version de Quarantaine publiée le 21 avril 2014)

  2. MLRD dit :

    En lisant vos derniers textes, à vous et à M. Rufiange, et encore avec celui-ci, on sent l’accomplissement de la vocation réelle de l’homme et de la femme par Mariam, Iossef et Ieschoua: cette vie de communion intime en Dieu. Les références et les liens que vous faites entre leur vie et la Genèse sont profonds et oh! combien remplis d’espérance. Ce n’est pas un beau roman, c’est vraiment une belle Histoire, notre histoire, celle à laquelle Dieu nous invite constamment! Cela vient nous saisir et je ne puis douter que vous ayez réfléchi et prié longuement afin de nous livrer votre méditation. Avec ce texte-ci, encore, on voit se succéder les Jours, les liens entre la création (lumière, eaux, ciel, etc.) et l’accomplissement du Projet de Dieu dans le temps. C’est la Promesse de Dieu qui s’accomplit et se dévoile à nos yeux.

    Je ne sais pas si vous allez mettre vos textes en un seul livre mais de les lire un après l’autre nous aide encore plus à goûter Dieu et à comprendre la beauté de notre propre existence, à ce à quoi nous sommes tous invités. Les textes de la Bible abordent le sujet mais pas de façon aussi « proche » et « sentie » que ce que vous arrivez à exprimer. Vous nous faites comprendre des textes, des psaumes, que nous avons eu l’occasion de lire mais dont nous n’avions peut-être pas saisi la profondeur. On a l’impression de toucher le coeur de Dieu et cela est vraiment inspirant et surtout, comme je l’ai mentionné ci-haut, porteur d’espérance pour chacun de nous, pour le monde d’aujourd’hui et celui à venir.

    Merci Mme Dupras et M. Rufiange, merci!

    (Note: Ce commentaire a d’abord été publié Dimanche, 4 mai 2014 à 15:21, à la suite de la première version de Quarantaine publiée le 21 avril 2014)

  3. MLRD dit :

    Je réitère mon commentaire sur le premier texte! C’est encore ce même mouvement du coeur qui m’a saisie en relisant votre texte mais de façon plus intense: c’est vraiment beau ce que Dieu a créé! J’entends souvent dernièrement, en chaire, des paroles du genre: « mais nous, à cause de notre humanité, nous sommes faibles » ou « parce que nous sommes hommes, nous ne sommes pas toujours bons ». C’est le péché le problème, pas l’homme que Dieu a créé! Je comprends que c’est ce qu’ils veulent sûrement dire mais je trouve que cela masque la réalité profonde de ce que Dieu a fait (comme s’il avait mal fait son travail) et assombrit notre espérance. Ils devraient lire votre texte! Dans celui-ci, je goûte particulièrement la présence de Iossef. On voit le oui profond de Iossef au projet du Père et sa mission intense qui lui est confiée. Il ne subit pas les événements, il adhère pleinement à ce que l’Esprit lui demande, en toute liberté.
    Merci encore et encore!

  4. Marie-Reine dit :

    2 février : Fête de la présentation de Jésus au Temple. Quelques ami(es)s et moi nous nous arrêtons pour méditer sur l’évènement et prier. La section de votre texte intitulé ¨Délivrance¨ a été une référence. Sa lecture a permis de nous recueillir
    rapidement et profondément. De mon côté la lecture de tous vos textes de Séquence de vie cachée m’apporte toujours de la sérénité. Merci

  5. Evelyne dit :

    Récemment, j’ai relu votre texte et plusieurs éléments ont enrichi ma compréhension de la sainte famille. Ce matin, un court extrait a retenu mon attention : « Ainsi les jours de Shabbat se prolongent et finissent par ne faire qu’un avec tout le temps. Mariam et Iôçeph sont constamment dans le temps de Dieu. Son Jour est tous les jours. »
    Il a suscité en moi le désir d’entrer dans ce sillon de prière continuelle avec Mariam et Iôçeph.

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