Mis à part les abus à caractère sexuel, quand on parle d’abus de pouvoir ou d’autorité dans le contexte de la « grande noirceur » québécoise, ce sont les liens étroits du régime politique de Maurice Duplessis avec l’Église catholique qui sont habituellement visés.
Dans les faits, le rapport entre Duplessis et les autorités religieuses apparaît plus complexe qu’on ne le laisse entendre. Certains soutiennent que Duplessis serait même intervenu auprès de Pie XII au sujet des « menées communistes » ou socialistes de Mgr Joseph Charbonneau de Montréal, notamment de son implication dans la grève de l’amiante d’Asbestos. Abus de pouvoir du premier ministre ou abus d’autorité de l’archevêque ?
On dit souvent que le passé éclaire le présent.
Plus proche de nous, puisque l’on s’en réclame encore, la Révolution tranquille entendait consommer la séparation de l’Église et de l’État en apportant les lumières de la laïcité. Les promoteurs de cette laïcité sont tellement convaincus de leur fait qu’ils n’hésitent pas, le cas échéant, à imposer leurs vues, la déconfessionnalisation des écoles par exemple. Abus de pouvoir politique ? Cependant, ils ne pourraient le faire aussi tranquillement sans la collaboration ou au moins le consentement de certains membres éminents du clergé québécois. Abus d’autorité cléricale ? On n’a qu’à penser à certaines déclarations d’évêques favorables à la laïcité lors de la Commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables.
Le cardinal Marc Ouellet, alors archevêque de Québec, s’était présenté devant ladite Commission à titre de Primat du Canada. Il a fait cavalier seul en défendant le principe de confessionnalité des écoles, suivant en cela l’enseignement de l’Église. En agissant ainsi abusait-il de son pouvoir, de son autorité?
Finalement, qui abuse de qui?
Francine D. Pelletier
Demain : « Abuseurs et abusés (2) »