Les trois sujets proposés par des lecteurs qui m’ont été attribués sont regroupés grosso modo autour de la thématique des valeurs. Dans notre société axée sur la performance tous azimuts, on parle beaucoup de mise en forme, suggérant différents exercices quotidiens bénéfiques pour la gérance du stress. Les valeurs sur lesquelles nous fondons notre vie seraient-elles des facteurs plus ou moins générateurs de stress ou de mieux-être ? Pourquoi ne pas y réfléchir au moins 15 minutes, le temps d’un blogue, d’un commentaire sur :
(1) «S’oublier, oui mais…» (semaine du 21 février)
(2) «Les accommodants incommodés» (semaine du 28 février)
(3) Les notions si prisées d’éthique et de justice (semaine du 7 mars)
Semaine du 28 février : «Les accommodants incommodés»
Sujet proposé par Pascale (mardi 22 février 2011- 15 :07): «Pourquoi les Québécois semblent-ils avoir rejeté en bloc les valeurs chrétiennes? Quelles références morales et éthiques ont remplacé celles de notre héritage chrétien. Sont-elles valables?»
L’autre jour, je m’amusais à écrire ma généalogie. Je regardais les noms de mes ascendants en essayant de les imaginer à l’époque où ils avaient vécu. À un moment de l’exercice, un fait me sauta aux yeux : tous ceux et celles qui m’ont fourni leurs gènes étaient chrétiens. C’est peut-être, avec la langue, le trait commun qui caractérise le plus mes ancêtres, et cela est vrai pour beaucoup de mes compatriotes.
Cette réalité, si près derrière nous, semble pourtant bien loin de nos pensées. L’évangile, qui a traversé deux mille ans d’histoire, ne serait plus valable? Je pense que le rejet des valeurs chrétiennes cité par Pascale exprime moins un rejet qu’un profond malaise chez notre peuple devant un enseignement qui n’a pas su trouver les mots pour mettre en valeur la pertinence de l’évangile pour notre temps.
Cette richesse de nos valeurs dites traditionnelles (ce mot est devenu péjoratif) demeurant comme voilée derrière un langage périmé, beaucoup ne la reconnaissent plus et la portent comme un héritage qui les incommode.
Il survient parfois des Jean Tremblay, maire de Saguenay, pour dire à voix haute que les principes chrétiens ont encore du bon et mettre en garde contre une attitude excessivement accommodante. N’y a-t-il pas en effet un risque de frelater notre propre identité?
Les Québécois … des accommodants incommodés? Difficile de voir clair dans ses valeurs quand on est en pleine crise d’identité.
Patrick Trottier
P.S. : J’ai conscience de ne pas traiter l’ensemble des questions posées par Pascale. J’ai tenté une première réponse à ma façon. La discussion ne fait que commencer…
Je suis heureux de voir que vous avez toujours gardé la plume!
En voyant que vous abordé le sujet délicat des « accommodements », je vous partage ma frustration fasse aux médias qui nous embarquent dans une pensée qui n’est pas la nôtre. Vous parlez du maire de Saguenay qui tente de défendre, dans le fond, une « minorité »… car je pense que nos croyances sont tellement enfouies que l’on peut se considérer comme une minorité… J’ai entendu cette semaine à la radio, un entre-filet qui parlait d’une vidéo sur YouTube de citoyens qui sont contre la prière pour dire qu’il y en a qui appuient le jugement de la cour. C’est bizarre, il ne me semble pas avoir entendu parlé auparavant des centaines de milliers de dollars que le maire a récolté des « pros prière »… Incroyable ce qu’un deux minutes « constitutionnel » peut avoir fait couler d’encre! La guerre, c’est la guerre… à vos plumes, prêts, en avant!
Pour moi, effectivement c’est le terme ‘traditionnel’ qui me dérange peut-être parce que je l’associe au terme ‘patrimoine religieux’. Ce dernier terme me semble plutôt une façon de placer la religion au niveau des musées.
Quel sens mélioratif y donnez-vous?
@Anonyme
Je trouve que le mot «traditionnel» a subi un sort semblable au mot «gai». Je trouve dommage de n’être plus capable de dire qu’une personne est gaie sans que notre esprit pense à l’homosexualité. J’aime la gaieté, elle est différente de la joie, elle a une richesse.
De même j’aime la tradition. Elle réfère à ce qui se transmet de génération en génération avec, à mon avis, une connotation positive, voire un caractère précieux. Pourquoi? Parce que je me dis que si nous désirons spontanément transmettre à nos enfants ce qu’il y a de meilleur, nos aïeux le désiraient aussi. Précieux parce que ces éléments dits traditionnels constituent souvent des repères pour notre identité.
Mais «traditionnel» est devenu synonyme de «qui n’a pas évolué», «qui n’a plus rapport aujourd’hui». Pourtant, si on parle du mets traditionnel qu’est la tourtière, nous ne voyons rien là de gênant, pas plus que nous rougissons de la tradition des Canadiens de Montréal. C’est quand il s’agit de l’héritage humain, et en particulier des valeurs chrétiennes qu’ont voulu nous transmettre nos prédécesseurs, que «traditionnel» est étiqueté «passé date».
Patrick Trottier