Le Fruit

Le premier chapitre de la Genèse accorde beaucoup d’importance à la semence et au fruit:

« Dieu dit : Que la terre verdisse de verdure : des herbes portant semence et des arbres fruitiers donnant sur la terre selon leur espèce des fruits contenant leur semence et il en fut ainsi. La terre produisit de la verdure : des herbes portant semence selon leur espèce, des arbres donnant selon leur espèce des fruits contenant leur semence, et Dieu vit que cela était bon. » (Gn 1, 11-12)

Les semences des herbes et les fruits des arbres existent pour la perpétuation des espèces, bien entendu, mais elles ont aussi une valeur en soi. Elles sont les trésors, la richesse du monde végétal, à la fois source de fécondité et nourriture.

La fécondité est un thème fondamental du premier chapitre de la Genèse. Elle est appliquée au végétal par le moyen des semences, celles des herbes et celles contenues dans le fruit des arbres. Elle est aussi appliquée à d’autres éléments de la création. Il faut cependant insister sur le fait qu’elle fait partie des attributs spécifiques de l’être humain créé homme et femme.

« Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. Dieu les bénit et leur dit : Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre. » (Gn 1, 27-28)

L’attribut de la fécondité fait donc partie de la définition de l’être humain et, par conséquent, elle est essentielle à la dimension anthropologique de l’Incarnation et de la Rédemption. Le mariage de Ioseph et Mariam répond à cette nécessité.

Par ailleurs, la fécondité de l’être humain, homme et femme, ne se réalise pas de façon symétrique. Elle passe par la femme qui porte l’enfant et est assumée par l’homme dans un rôle de protection et de sustentation. La femme et l’homme évoluent chacun dans une dimension spécifique mais ensemble. On ne peut pas les séparer. On peut les diviser mais pas les séparer.

Nous avons dans le lieu et le temps de l’Incarnation, un couple béni de la fécondité par Dieu : Ioseph et Mariam, et un fruit : Ieshoua, LE Fruit! C’est la conscience aiguë et intime de ce principe de la réalité humaine qui a amené l’exclamation d’Elizabeth : «Béni le fruit de ton sein ! » (Lc 1, 42c).

Nous avons donc Adam Homme et Femme et nous avons Adam Fruit. Asymétrie. Dieu n’a pas demandé à Jésus de s’inscrire dans la dynamique fondamentale de la fécondité humaine comme ses parents. Sa fécondité est d’un autre ordre. Elle est celle du grain que l’on broie et du fruit que l’on presse. Pain et vin.

Car le projet de salut de Dieu est immensément logique.

Dieu, au commencement, avait dit : « Je vous donne toutes les herbes portant semence, qui sont sur toute la surface de la terre, et tous les arbres qui ont des fruits portant semence : ce sera votre nourriture. » (Gn 1, 29)

L’Humain, en mangeant du fruit de l’arbre de Tov et Ra, qui lui avait été interdit, a perdu l’accès à l’arbre de vie :

« Puis Yahvé Dieu dit : Voilà que l’homme est devenu comme l’un de nous, pour connaître le bien et le mal ! Qu’il n’étende pas maintenant la main, ne cueille aussi de l’arbre de vie, n’en mange et ne vive pour toujours ! » (Gn 3, 22)

Quand les temps furent accomplis, c’est Jésus lui-même qui devient la nourriture de la Vie :

« Or, tandis qu’ils mangeaient, Jésus prit du pain, le bénit, le rompit et le donna aux disciples en disant : « Prenez, mangez, ceci est mon corps. » Puis, prenant une coupe, il rendit grâces et la leur donna en disant : « Buvez-en tous car ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés. » » (Mt 26, 26-28)

Le pain, qui vient du grain, la semence des herbes… le vin qui vient du fruit de l’arbre, la vigne…

Ainsi est consommée l’histoire de l’Incarnation. Mariage, fécondité et fruit, d’un repas à l’autre.

Tout est consommé.

Ce contenu a été publié dans Essais, Jean-Marc Rufiange, Réflexions, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

4 Responses to Le Fruit

  1. Florence dit :

    Merci beaucoup M. Rufiange pour cette nouvelle réflexion! Très riche en profondeur ce lien entre le premier chapitre de la genèse et l’Eucharistie. Je continuerai certes à réfléchir à tout ça pendant un bon bout de temps….une vraie mine d’or!!!

  2. Anne dit :

    Bonjour Monsieur Rufiange,

    Je ne saisis pas la différence entre diviser et séparer. Pourriez-vous m’aider à le comprendre?

    Merci

  3. MLRD dit :

    M. Rufiange, j’aimerais avoir un éclaircissement. Avec cette citation que vous apportez:
    « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. Dieu les bénit et leur dit : Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la (…) », je vois que la famille est un plan divin, que Dieu a bénie. Par contre, dans les évangiles, il est une citation de Jésus qui dit quelque chose comme: « au ciel, il n’y aura plus ni hommes, ni femmes, vous serez comme des anges ». C’est un appel à quelque chose de différent qui, j’imagine doit débuter dès maintenant, puisque « le Royaume est au dedans de nous ». Est-ce donc qu’il y a une évolution dans le plan de Dieu qui fait qu’à un certain temps, il fallait se multipliez et qu’avec l’avènement de la Sainte Famille, Dieu nous fait comprendre qu’il y aussi d’autres fruits à des relations hommes-femmes, des relations vierges mais fécondes? Je ne veux pas du tout dire qu’avoir des enfants est le seul fruit d’un couple homme-femme engagé l’un envers l’autre car je crois qu’il y a bien autres choses que cela dans le mariage, comme vous nous l’avez démontré dans les différents blogues des dernières semaines. Ma question est en fait assez bête: si les hommes et les femmes ne se multiplient plus, sous la grâce de Dieu, il n’y aura éventuellement plus personne sur la terre, étant donné que nous sommes mortels?
    Merci de m’aider à comprendre, ce que, peut-être, j’oppose à tort?

    • Louise dit :

      Je ne suis pas en mesure de répondre à vos questions mais pour vous donner une bonne piste de réflexion, qui va, je crois, dans le sens de vos interrogations, je vous suggère fortement, si vous n’avez pas encore eu l’occasion de le faire, de lire le dernier essai de M. Rufiange « Almah et Elem ou le vecteur de la virginité ». C’est un texte à méditer et peut-être y trouverez vous quelques réponses. Bonne découverte!

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée.

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.