Statut et infléchissement

Ce qui m’apparaît évident, et je pense qu’André Bessette que l’on s’apprête à canoniser en grande pompe le 17 octobre prochain sera d’accord avec cette lecture, c’est que le statut réservé à Joseph dans l’Église n’est pas ce qu’il devrait être. Il connaît même une certaine régression. Certains ont parlé d’infléchissement à la suite de Vatican II.

Cet infléchissement ne concerne pas seulement des chrétiens de gauche qui verraient dans la dévotion à Joseph une perte de temps « bourgeoise », comparativement à un engagement sociopolitique concret en faveur des plus pauvres. Il concerne aussi ces chrétiens de droite qui ont rejeté en bloc Vatican II et qui, étant essentiellement christocentriques, ne se préoccupent guère de l’espace reconnu à Joseph dans l’Église, considérant comme une excentricité la mention de son nom dans le canon de la messe (voir mon blogue précédent : « Joseph et les Apôtres »).

L’infléchissement n’est même pas une tendance réservée à ces opiniâtres de la gauche et de la droite, il a été pour ainsi dire confirmé officiellement dans le nouveau calendrier approuvé par Paul VI, le 14 février 1969. Et jamais démenti.

Dans ce calendrier, la fête de Joseph fixée au 19 mars ne comporte plus le titre de « patron de l’Eglise universelle », bien qu’il le demeure. À cette mesure s’ajoute le fait qu’au 1er mai, la fête de Joseph artisan a été « rétrogradée »; la « fête » n’est plus qu’une simple « mémoire » laissée au libre usage des prêtres.

Le motif évoqué : d’après la Congrégation pour les sacrements et le culte divin, il faut « éviter d’en arriver à une inflation du sanctoral ».

Pour aujourd’hui, j’en ai assez dit.

Je suis outrée. Et vous ?

Francine D. Pelletier

Demain : « Joseph et l’inflation »

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2 Responses to Statut et infléchissement

  1. Marilyn dit :

    Je suis outrée moi aussi. Cela m’apparaît assez incroyable de voir à quel point notre propre Église s’auto-détruit. Je l’ai déjà écrit dans ce blog mais, encore une fois, vos propos me laissent triste et déçue. Au lieu de nous tirer vers l’avant, l’Église cherche à camoufler des exemples et leaders puissants. Heureusement qu’il y a des gens comme André Bessette pour nous les indiquer.

  2. Francine D. Pelletier dit :

    @Marilyn

    Ce n’est pas sans raison si je me suis «arrêtée» au moment où je me suis aperçue que j’étais «outrée». Cette attitude présume, d’une certaine façon, de la responsabilité coupable des acteurs en cause. Je me suis donc demandé si ces mesures adoptées par la Congrégation pour les sacrements et le culte divin étaient le fruit d’une résistance absolument consciente du «haut clergé» à l’égard de Joseph. Probablement pas, mais je pense qu’il y a quelque chose dans la théologie qui produit cet effet.

    Entre autres, et je l’aborde dans plusieurs de mes blogues, je pense au fait de tout concentrer sur le Christ, en dépit de la révélation que Jésus fait lui-même de la Trinité (le Père, le Fils et l’Esprit Saint), et de fonder une théologie du sacerdoce sur ce christocentrisme. Ce dernier éclipse en quelque sorte les implications de l’Incarnation qui se manifestent dans les rapports entre les trois personnes de la «sainte famille» : Jésus, Marie et Joseph. Ces implications sont alors renvoyées du côté de la dévotion, de la spiritualité, et donc, hors du discours théologique comme tel.

    Cela étant dit; chaque découverte que nous faisons sur Joseph nous révèle un peu plus son visage et produit déjà son effet, d’abord sur nous-mêmes, mais aussi dans l’Église.

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